Le Lung Clearance Index: mesure de la fonction respiratoire permettant de déterminer les lésions pulmonaires durant les études cliniques

6 septembre 2019

 Le Lung Clearance Index (LCI) est un paramètre basé sur la mesure des échanges gazeux. Ce chiffre représente le temps qu’il faut pour qu’un gaz spécifique disparaisse des poumons après son inhalation. Il représente donc une indication concernant l’état des poumons. En cas de lésions, le  gaz mettra plus de temps à disparaître. Comme dans la mucoviscidose par exemple, où le gaz peut-être « emprisonné » dans les voies respiratoires à cause du mucus. Ou lorsque les poumons sont endommagés suite à des réactions inflammatoires.

Comment se déroule la mesure du LCI ?

Figuur: Subbarao et al. Annals ATS 2015

Il existe deux techniques pour mesurer le LCI. D’une part (figure A), on peut suivre la concentration d’un gaz naturellement présent dans nos poumons, comme l’azote (N2). Au départ, on commence par mesurer la concentration d’azote dans l’air présent dans les poumons. Celle-ci tourne normalement autour de 80%. Ensuite, le masque respiratoire de la personne testée est raccordé à de l’oxygène pur. La concentration en azote dans l’air expiré diminue au fur et à mesure. Plus cela dure longtemps, plus les lésions pulmonaires sont importantes. Une seconde méthode (figure B) consiste à faire inhaler par masque à la personne testée un gaz inerte qui ne se trouve pas naturellement dans les poumons. Comme de l’hélium par exemple. Ce gaz sera inhalé jusqu’à ce que la concentration atteigne 4%. Ensuite, l’arrivée de gaz inerte est coupée, et la personne testée inhale de l’air. Il s’agit de mesurer combien de temps il faut pour que la concentration du gaz inerte dans l’air expiré atteigne 0%.

Quelle est la valeur ajoutée du LCI?

Grâce à l’amélioration continue du traitement et des médicaments permettant de maintenir la mucoviscidose sous contrôle, un grand nombre d’enfants et d’adolescents touchés par la maladie possèdent aujourd’hui une fonction respiratoire normale (VEMS ou volume expiré maximum par seconde FEV1). Cela ne veut pas dire pour autant que les poumons ne sont pas touchés par des lésions. L’atteinte des voies respiratoires par la mucoviscidose débute dans les petites voies respiratoires. Tandis que les techniques de mesure de la fonction respiratoire permettent d’évaluer l’état des grandes voies respiratoires. Des lésions pulmonaires précoces peuvent être détectées au moyen d’une tomodensitométrie (CT scan): plusieurs études menées avec le CT scan ont permis de détecter des anomalies respiratoires, même chez de très jeunes enfants dès l’âge de huit mois, sans que ceux-ci ne présentent de symptômes. Le plus grand problème du CT scan, c’est que l’examen libère beaucoup de rayons, ce qui peut s’avérer nocif, surtout pour les enfants en pleine croissance. C’est pourquoi, on ne procède à un CT scan qu’une fois tous les deux ans chez les enfants. Le CT scan ne représente donc pas la méthode de prédilection pour détecter l’évolution des lésions pulmonaires.

Le Lung Clearance Index (LCI) combine la précision du CT scan et le confort de la mesure de la fonction pulmonaire. De plus, contrairement à la mesure de la fonction pulmonaire, cette technique ne demande qu’une participation limitée de la personne testée et ne nécessite l’apprentissage d’aucune technique. Cela permet d’utiliser le LCI chez les très jeunes enfants, dès le moment où ils sont capables de rester immobiles (environ ¼ d’heure, le temps de regarder un petit film par exemple) et d’inspirer et expirer en portant un masque.

Qu’avons-nous déjà appris grâce au LCI?

En 2017, une grande étude a été menée dans trois centres muco nord-américains concernant l’utilisation du LCI pour surveiller l’évolution des lésions pulmonaires chez les jeunes enfants. Quelque 156 enfants entre 2,5 et 6 ans y ont participé. Au total, 800 mesures par LCI ont été réalisées.

Ce schéma montre que chez les enfants atteints de mucoviscidose (ligne pointillée), le LCI est non seulement supérieur (plus haut = plus mauvais = plus de lésions pulmonaires), mais qu’il augmente également au fur et à mesure que les enfants grandissent. Ce qui n’est pas le cas chez les enfants en bonne santé (ligne pleine). Même lorsque la mesure par LCI était réalisée sur des enfants ne manifestant ni symptômes ni infections, le LCI augmente au fil du temps de manière claire. Un certain nombre de facteurs sont liés à un LCI plus élevé et donc plus négatif. À savoir une infection au Staphylocoque aureus et au Pseudomonas aeruginosa, une poussée infectieuse nécessitant un traitement aux antibiotiques et une toux récurrente non traitée aux antibiotiques. Les enfants ayant un meilleur poids pour leur âge possèdent également un LCI moins élevé, donc meilleur. L’étude complète est à retrouver ici .

Le LCI peut-il être utilisé pour évaluer l’efficacité de nouveaux médicaments lors d’une étude clinique ?

Bien sûr, et c’est d’ailleurs le cas. Un exemple important de cette application: l’évaluation de l’efficacité de l’Orkambi®, un modulateur-CFTR, chez les enfants entre 6 et 12 ans.

Figuur: Milla et al. American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine 2017

Le schéma ci-dessus montre qu’après quatre semaines de traitement, une diminution convaincante du LCI a été constatée. Ce qui atteste de l’amélioration de l’état des poumons. Cette diminution a quasi été maintenue durant toute la durée du traitement (24 semaines).

L’European Cystic Fibrosis Society, l’association scientifique la plus importante concernant la mucoviscidose en Europe, est également arrivée à la conclusion que le LCI représentait un paramètre intéressant pour les études cliniques avec des enfants et des personnes avec une atteinte pulmonaire légère. Il existe néanmoins encore une série de choses à éclaircir. Comme de savoir quelle est la différence de LCI clinique significative (le schéma ci-dessus montre une diminution du LCI de plus d’une unité, mais les enfants ressentent-ils réellement une amélioration dans leur vie quotidienne?). Ou si le LCI peut également être utilisé chez des personnes avec une atteinte pulmonaire plus avancée (dans ce cas, la mesure du LCI durerait plus longtemps parce que le gaz mettrait plus de temps à disparaître dans les poumons ; mais de ce fait, une telle mesure est-elle envisageable ?).